Interview de Lorène Bihorel réalisé par Laure Clarenc

 

Quel est votre parcours ? Avez-vous toujours baigné dans le milieu du spectacle ?

Mes deux parents sont peintres, j'ai donc très vite été sensibilisée aux pratiques artistiques d'une manière générale, au dessin plus particulièrement. J'ai toujours pratiqué en autodidacte. Intéressée aussi à cette époque par le théâtre, j'ai passé un an dans une école d'art dramatique, cela m'a beaucoup appris, mais je n'étais pas très à l'aise à jouer un rôle, j'ai donc arrêté dans l'idée de poursuivre mes expériences seules. Je ne suis pas restée seule très longtemps, j'ai croisé le chemin de Djoé, avec qui j'ai joué pendant cinq ans un spectacle d'animation dans les maisons de retraite et les hôpitaux, ce qui m'a permis de gagner en confiance. Cette fois je n'avais pas à jouer un rôle, je chantais et dansais avec les papis et les mamies et ça me plaisait beaucoup ! Cela m'a également permis d'avoir le temps et les moyens de dessiner, et c'est ainsi que j'ai pu réaliser "Des rêves dans le sable" !

 

Comment vous est venue cette idée si particulière de spectacle ?

Quand j'avais 15 ou 16 ans, j'ai découvert une Ukrainienne qui dessinait avec cette technique, et cela m'avait beaucoup touché. Moi qui pouvait passer des heures entières sur un seul dessin, tout à coup je découvrais des dessins qui apparaissaient en quelques secondes, pour être aussitôt transformés... C'était magique ! A l'époque j'étais trop jeune encore, et je n'ai pas eu idée d'essayer. J'ai redécouvert la vidéo quelques années plus tard, à 22 ans, j'avais gagné en maturité, et cette fois j'étais accompagnée par Djoé, qui a pu construire tout le matériel du spectacle sur mesure, et qui m'a accompagné tout au long de cette expérience. C'était un très gros travail, et à l'époque je n'aurais jamais envisagé de faire tout cela seule !

 

Comment pensez-vous vos spectacles et combien de temps prend la réalisation d’un spectacle ?

Je n'ai réalisé qu'un seul spectacle pour le moment. Et au moment où je le créais, je ne savais même pas que ça allait devenir un spectacle ! Au début je voulais juste faire une petite histoire de cinq minutes, et puis finalement j'ai créé une première histoire, puis une deuxième, une troisième... Ce spectacle s'est créé au fur et à mesure que je découvrais la technique ! C'est pourquoi chaque séquence emmène dans un univers différents. J'ai voulu explorer les différentes possibilités qu'offraient cette technique, pour chaque fois surprendre le spectateur ! Regarder quelqu'un dessiner c'est chouette, mais on avait peur qu'au bout d'une heure les gens s'ennuient. Mais finalement pas du tout, on me reproche même plutôt que ça soit trop court !

 

Quel(s) savoir(s) –faire faut-il pour être capable de dessiner dans le sable et réaliser un spectacle complet ?

Houlàlà rude question ! Il y a autant de manières de réaliser un spectacle qu'il y a d'individus sur cette planète ! Chacun agit selon ses propres qualités et sensibilités... Pour moi déjà il était essentiel que je sois accompagnée, car à l'époque j'avais beaucoup de mal à concrétiser des gros projets toute seule. Il faut beaucoup de persévérence, et savoir que Djoé s'engageait autant sur ce projet m'a motivée à poursuivre malgré les difficultés et la fatigue ! Ensuite oui forcément, le dessin était une base essentielle à l'élaboration de ce spectacle, car cela demande beaucoup de précision.

 

Quelles sont les réactions habituelles du public, face à vos œuvres ? 

Les spectateurs ressortent apaisés et émerveillés, d'ailleurs on fait attention de ne pas rallumer la lumière trop vite car c'est comme s'ils sortaient d'un rêve...

 

Comment réussissez-vous à renouveler votre spectacle ? Avez-vous déjà des idées de nouvelles histoires ?

Pour l'instant je garde ce spectacle tel qu'il est. Je le trouve bien équilibré, et après plus de 650 représentaion je suis toujours aussi heureuse de le jouer car je sais qu'il fait du bien aux gens. Pour l'instant je n'ai pas de nouveau spectacle en création. La tournée me prend beaucoup de temps, or j'aurais besoin d'au moins un ou deux ans de travail ! Qui sait plus tard... Je continue d'y réfléchir, à mon rythme, c'est à dire tranquillement. Par contre je continue bien sûr de dessiner de nouvelles choses, j'ai notamment réalisé un album illustré avec l'auteur Erik l'Homme, ça s'appelle "La patience du héron", édité en septembre dernier par Gallimard Jeunesse, et depuis mais 2018 j'ai commencé à réaliser des tableaux lumineux en fixant le sable à même le verre ! Cette nouvelle pratique m'enthousiasme beaucoup !

 

Où puisez-vous votre inspiration ?

Dans la beauté, l'harmonie... J'aime ce qui fait du bien ! Le besoin de dessiner me prend de manière alléatoire. Je suis beaucoup inspirée par les portraits humains notamment, je cherche une expression qui me touche, et j'essaie de la retranscrire, toucher quelque chose de profond dans l'âme... D'ailleurs c'est assez rigolo, je me surprends souvent à mimer l'expression du personnage que je dessine, tellement je suis concentrée dessus ! La musique aussi, m'inspire beaucoup, même si c'est d'une manière indirecte, elle est presque toujours présente lors de mes longues séances de dessin ! Et la nature, bien sûr, m'inspire énormément.